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Brimades et violences sont fréquentes dans les écoles du monde entier

Les gouvernements devraient d’urgence aborder le problème des abus liés à l’éducation

Au Liban, les enfants réfugiés syriens qui ont été admis dans des écoles publiques sont parfois confrontés aux brimades d’autres élèves et à des mesures disciplinaires strictes de la part d’enseignants, comme l’interdiction d'aller aux toilettes pendant un cours. © 2019 Dadu Shin pour Human Rights Watch

(Londres) – Les gouvernements du monde entier devraient urgemment intensifier leurs efforts pour garantir la sécurité des élèves dans les écoles et les espaces en ligne, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui, à l’occasion de la première Journée internationale contre la violence et le harcèlement en milieu scolaire, y compris le cyber-harcèlement, célébrée ce 5 novembre. De nombreux gouvernements n’ont toujours pas banni les châtiments corporels, et beaucoup sont à la traîne pour protéger les élèves contre les violences physiques ou sexuelles et le harcèlement, tant en milieu scolaire qu’en ligne.

Dans la plupart des pays, des élèves font l’objet de violences, brimades et discriminations. D’après les Nations Unies, plus de 246 millions d’enfants subissent chaque année des violences basées sur le genre au sein ou près des établissements scolaires, tandis qu’un élève sur trois fait l’expérience de brimades et de violences physiques. La moitié des adolescents du monde rapportent des violences infligées par leurs condisciples en milieu scolaire.

« Il est aberrant que les élèves de tant de pays subissent une terrible violence à l’école, qui peut les affecter toute leur vie », a déclaré Elin Martinez, chercheuse senior auprès de la division Droits des enfants de Human Rights Watch. « Les graves abus, comme les violences sexuelles et physiques, portent profondément atteinte à la dignité des élèves, à leur autonomie corporelle et à leur capacité d’apprendre et de se sentir en sécurité dans leur école.»

Les recherches de Human Rights Watch sur les obstacles à l’éducation dans plus de 15 pays ont constaté que les enfants et jeunes gens subissaient diverses formes de violence de genre en milieu scolaire. Les élèves rapportent souvent des châtiments corporels, une exploitation sexuelle, des abus et harcèlements, des violences physiques et des brimades. Les auteurs de ces abus sont généralement des enseignants et des responsables scolaires, ainsi que d’autres élèves.

Les filles, les enfants en situation de handicap, les enfants réfugiés ainsi que les élèves LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres) font souvent l’expérience d’un degré élevé de violences et de brimades. La violence à l’encontre de ces enfants ne reçoit souvent que peu d’attention à cause des attitudes discriminatoires et néfastes qui prévalent, perpétuant le silence et l’impunité.

En dépit de progrès importants, les châtiments corporels scolaires demeurent légaux dans 67 pays au moins. Beaucoup d’enseignants utilisent toujours ce type de punition pour contrôler les salles de classe et exercer leur autorité. Au Liban, les enfants sont fréquemment battus, giflés et humiliés. En Afrique du Sud, certains enfants ayant des handicaps, surtout sensoriels et intellectuels, ainsi que les enfants autistes, sont exposés à la violence physique, aux agressions verbales et à la négligence des enseignants et des assistants, à la fois dans les établissements ordinaires et spécialisés.

La violence sexuelle en milieu scolaire, y compris le viol, l’abus sexuel et l’exploitation sexuelle, reste sous-déclarée dans beaucoup de pays. Au Sénégal et en Tanzanie, les enseignants et responsables scolaires exploitent fréquemment les filles sexuellement, en échange d’argent pour les frais de scolarité, de bonnes notes et d’articles de base comme des serviettes hygiéniques. De nombreuses filles ont confié à Human Rights Watch qu’elles n’avaient pas dénoncé ces violences sexuelles parce que les dirigeants de leur établissement ne les croyaient pas, surtout lorsque les responsables étaient des professeurs.

Quant aux élèves LGBT, ils font face aux brimades, discriminations et violences dans de nombreux pays, mais sont souvent exclus des politiques ou mesures anti-harcèlement mises en place pour atténuer la violence scolaire. Au Japon et au Vietnam, du fait du manque de formation et de responsabilisation du corps enseignant, les professeurs non seulement laissent faire, mais aussi contribuent aux brimades infligées aux élèves LGBT.

De plus en plus d’enfants sont touchés par une violence sur Internet basée sur le genre, en lien avec leur vécu scolaire. C’est de plus en plus inquiétant, eu égard à l’accroissement du temps que les élèves passent en ligne suite aux fermetures d’établissements dues à la pandémie de Covid-19. Le harcèlement en ligne affecte également les jeunes personnes LGBT – les abus se déplaçant alors de la salle de classe aux espaces Internet. Aux Philippines et aux États-Unis, les élèves LGBT décrivent les effets des commentaires et insultes anti-LGBT ainsi que des rumeurs se propageant rapidement, facilitées par les médias sociaux. Cette exposition publique et ces moqueries ont des répercussions sur la santé mentale et les résultats scolaires des enfants, a constaté Human Rights Watch.

Dans les pays qui n’ont pas de politiques claires et contraignantes faisant en sorte que les établissements scolaires luttent contre toutes les formes de violence et de harcèlement, y compris sur Internet, de mauvaises pratiques similaires sont souvent perpétuées, a déclaré Human Rights Watch. Beaucoup d’établissements scolaires n’ont aucune politique protégeant les enfants, ni aucune mesure de protection pour garantir la sécurité des enfants les plus exposés aux risques.

Dans beaucoup de pays, les enfants ne reçoivent pas d’éducation sexuelle exhaustive, adaptée à leur âge. Cet enseignement essentiel constitue un point d’entrée pour que les élèves et les professeurs puissent parler de la violence basée sur le genre, permet aux enseignants d’aborder des conversations sensibles ou difficiles de façon non stigmatisante et donne aux enfants les moyens de dénoncer les abus ou comportements néfastes.

Souvent les établissements scolaires n’ont pas de conseillers ou d’enseignants suffisamment formés à la protection de l’enfance. Dans les pires cas, les responsables scolaires manquent à leur devoir de protéger la vie privée des enfants ou de respecter la confidentialité, les exposant ainsi à la stigmatisation, à l’humiliation et aux représailles. Même lorsque les enfants dénoncent les abus, les responsables scolaires ne prennent pas toujours ces allégations au sérieux, ne prenant pas l’initiative de lancer une enquête ou de renvoyer l’affaire aux autorités compétentes.  

Les gouvernements devraient de toute urgence adopter des politiques nationales contraignantes qui garantissent la protection des élèves dans les établissements scolaires et les espaces Internet. Ceux qui ont déjà mis des politiques en place devraient veiller à ce qu’elles prévoient des protections pour les enfants particulièrement susceptibles de subir des abus, surtout les filles, les élèves LGBT et les enfants handicapés. Les établissements scolaires devraient disposer de systèmes de plainte faciles d’accès et confidentiels, ainsi que de conseillers, enseignants ou responsables scolaires qui jouent le rôle de points focaux pour la protection de l’enfance et sont disponibles pour apporter un soutien immédiat aux élèves menacés ou subissant des abus.

Les écoles devraient tisser des liens avec les centres locaux de protection de l’enfance et de santé pour veiller à ce que les enfants ayant subi des abus soient correctement entendus et renvoyés vers les services adéquats de santé sexuelle et procréative, y compris, si nécessaire, en vue d’une contraception d’urgence ou d’une interruption de grossesse. Ils devraient par ailleurs donner aux élèves accès à des services psychosociaux – de santé mentale –, y compris des soins psychiatriques. Les gouvernements devraient également veiller à ce que les établissements dispensent une éducation sexuelle obligatoire, scientifiquement rigoureuse et adaptée à l’âge.

« Les enfants ont le droit d’apprendre dans un environnement physique et numérique sûr et devraient pouvoir faire confiance aux adultes qui ont l’obligation légale et morale de les protéger », a conclu Elin Martinez. « Ce principe clé devrait guider tous les efforts des gouvernements pour réduire, puis éradiquer, le fléau de la violence et du harcèlement dans les établissements scolaires et les espaces en ligne. »

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