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États-Unis : Soutenir la quête de justice pour les crimes graves internationaux

L’administration Biden devrait appuyer les efforts de justice internationale et examiner les allégations d’actes de torture précédemment commis

Des personnes déplacées vivant dans le camp d’Ardamata à El-Geneina, capitale du Darfour-Occidental au Soudan, saluaient l’annonce du début des procédures dans l'affaire contre le chef de milice janjaouid Ali Kushayb à la Cour pénale internationale.   © 2020 Privé/Radio Dabanga (www.dabangasudan.org)

(Washington) – Les États-Unis devraient réaffirmer leur soutien à la justice pour les victimes de graves crimes internationaux dans le monde, a déclaré Human Rights Watch dans un rapport rendu public aujourd’hui. Alors que l’administration du président Joe Biden renouvelle l’engagement de Washington en faveur du multilatéralisme, elle devrait aussi veiller à faire de l’établissement des responsabilités pour les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et le génocide un élément clé d’une politique étrangère axée sur les droits humains.

Le rapport de 27 pages, intitulé « Essential Proposals to the Biden Administration to Advance International Justice » (« Recommandations essentielles à l’administration Biden pour faire progresser la justice internationale »), décrit cinq domaines dans lesquels les États-Unis peuvent démontrer un engagement fort en faveur de la justice pour les victimes d’atrocités. Human Rights Watch détaille les moyens par lesquels le gouvernement américain peut faire progresser la réalisation de cet objectif pour des pays spécifiques comme l’Éthiopie et le Myanmar. Human Rights Watch appelle aussi le gouvernement américain à soutenir la Cour pénale internationale (CPI), d’autres juridictions internationales ou hybrides comme la Cour pénale spéciale en République centrafricaine, ainsi que les poursuites judiciaires engagées au niveau national, notamment celles engagées en vertu du principe de compétence universelle.

« Le président Biden a signalé un engagement renouvelé à coopérer avec ses alliés et les institutions multilatérales », a déclaré Liz Evenson, directrice adjointe du Programme Justice internationale au sein de Human Right Watch. « Soutenir la justice pour les victimes des crimes internationaux les plus graves devrait figurer au premier plan de l’engagement de l’administration Biden. En tant que composante de l’état de droit, la justice internationale renforce la coopération intergouvernementale et est au cœur de la lutte contre l’impunité à travers le monde. »

Promouvoir l’établissement des responsabilités par le biais de poursuites pénales est essentiel pour que les victimes et leurs familles obtiennent justice et joue un rôle pour mettre fin aux cycles de violence. Le soutien des États-Unis a été essentiel à l’efficacité des processus judiciaires dans le monde entier, de la Bosnie à la Sierra Leone. Malgré le soutien bipartite exprimé en faveur de la justice internationale, la position des États-Unis sur la CPI, pièce maîtresse de ce système en constante évolution, a changé ces dernières années, passant de l’hostilité initiale de l’administration de George W. Bush à un soutien et une coopération plus ouvertes sous l’administration Obama. Sous Trump, les États-Unis ont imposé des mesures punitives contre le personnel de la CPI, notamment des sanctions financières et des interdictions d’entrée sur le territoire américain, dans le but de contrecarrer les enquêtes menées en Afghanistan et en Palestine. Lorsque le président Biden a annulé ces sanctions sans précédent en avril 2021, il a entamé ce qui pourrait être un processus attendu de longue date pour restaurer la crédibilité des États-Unis en matière de justice internationale.

Le gouvernement américain devrait aider à renforcer l’établissement des responsabilités pour les crimes de guerre et les éventuels crimes contre l’humanité commis dans la région du Tigré en Éthiopie, les crimes contre l’humanité et les actes de génocide perpétrés contre les Rohingyas au Myanmar, et d’autres atrocités ailleurs, a préconisé Human Rights Watch.

Cela comprend le soutien aux mécanismes d’enquête mandatés par l’ONU et le réengagement des États-Unis auprès du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, qui a un rôle essentiel à jouer dans la promotion de la justice. Le rapport de Human Rights Watch fait également des recommandations spécifiques pays par pays pour renforcer les garanties de procédures crédibles et équitables devant les tribunaux nationaux et hybrides (c’est-à-dire des juridictions mixtes, qui sont à la fois internationales et nationales).

Un soutien significatif à la justice internationale doit inclure la CPI, selon Human Rights Watch. Tout en levant les sanctions imposées par l’administration Trump, l’administration Biden a clairement indiqué que les États-Unis continuent de s’opposer aux « actions de la CPI » en Afghanistan et en Palestine, et plus généralement à toute juridiction de la CPI sur les ressortissants des États n’ayant pas adhéré au Statut de Rome de la Cour, son traité fondateur. La CPI a ouvert des enquêtes sur ces deux situations, bien que celle menée en Afghanistan soit actuellement suspendue. Ces enquêtes pourraient inclure un examen minutieux des crimes présumés commis par des ressortissants américains et israéliens, respectivement. Les objections américaines à la compétence de la CPI n’ont aucun fondement juridique et ne font que renforcer l’impunité.

L’administration Biden devrait envisager ces enquêtes au travers du prisme de la lutte contre l’impunité pour les pires violations des droits humains. Les enquêtes ne se limitent en aucun cas aux allégations de crimes commis par des ressortissants américains et israéliens, mais pourraient s’étendre à ceux commis contre des civils par de multiples acteurs, notamment les talibans, les forces gouvernementales afghanes et les groupes armés palestiniens, ouvrant ainsi aux victimes la voie tant attendue vers la justice.

Par le biais de procédures prévues par le Statut de Rome, le traité ayant porté création de la CPI, les États-Unis pourraient mener des enquêtes rigoureuses sur les allégations de crimes commis par des ressortissants américains dans le cadre du conflit en Afghanistan, et engager des poursuites judiciaires, le cas échéant ; ceci invaliderait la nécessité pour la CPI de mener elle-même de telles enquêtes. Le secrétaire d’État Antony Blinken a reconnu qu’en principe, les États-Unis devraient « diriger par la puissance de notre exemple ». Pour persuader d’autres pays de demander des comptes pour des crimes graves et avoir la crédibilité de défendre la justice au niveau international, les États-Unis devraient s’engager à véritablement revenir sur leurs abus passés commis dans le cadre du conflit en Afghanistan et à se doter de politiques en vue de prévenir de futurs abus, selon Human Rights Watch.

« En tant que tribunal de dernier recours, la CPI a un rôle essentiel à jouer et l’administration Biden ne devrait pas permettre que des préoccupations étroites concernant certaines enquêtes fragiliser son engagement plus vaste en matière d’établissement des responsabilités », a conclu Liz Evenson. « L’administration Biden devrait démontrer qu’elle prend au sérieux une politique étrangère centrée sur les droits humains en épaulant ses alliés pour soutenir la justice en faveur des victimes de crimes internationaux graves et faire de la coopération avec la CPI une règle. »

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