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Philippines : Mettre fin au recours meurtrier à des « étiquettes rouges »

L’ONU et les gouvernements influents devraient exhorter le président Duterte à abandonner cette pratique qui vise des activistes

(Manille, le 17 janvier 2022) – Le gouvernement des Philippines devrait cesser de diffamer des activistes en les affublant d’une « étiquette rouge » pour les faire passer pour des rebelles ou des partisans de l’insurrection communiste, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch,. L’organisation a également diffusé une vidéo sur cette pratique dangereuse, et sur son impact. Cette vidéo présente une activiste des droits humains, la présidente d’un réseau de défense des droits des travailleurs et un journaliste auxquels les autorités ont indûment accolé cette étiquette.

La pratique des « étiquettes rouges » (« red-tagging » ou aussi « red-baiting »), est utilisée depuis des décennies aux Philippines dans le cadre de la campagne du gouvernement contre la Nouvelle armée populaire (New People’s Army, NPA), affiliée au Parti communiste philippin, qui a commencé en 1969. Dans le cadre de sa lutte contre l’insurrection, le gouvernement emploie une stratégie consistant à accuser publiquement des activistes, des journalistes, des dirigeants politiques et d’autres personnes, ainsi que leurs organisations, d’être directement impliqués dans l’insurrection ou de soutenir la NPA. L’armée philippine est depuis longtemps suspectée d’être responsable de nombreuses exécutions extrajudiciaires de prétendus communistes, et d’actes de torture.

« L’imposition d’une étiquette rouge est une pratique pernicieuse qui cible des personnes et aboutit souvent à ce que ces personnes soient harcelées, voire même tuées », a déclaré Carlos Conde, chercheur senior sur les Philippines auprès de la division Asie de Human Rights Watch. « Cette pratique réduit rapidement l’espace vital de l’activisme pacifique aux Philippines. »

Le recours aux « étiquettes rouges » est devenu encore plus meurtrier depuis que Rodrigo Duterte est arrivé au pouvoir en 2016. Duterte a créé la Force opérationnelle pour mettre fin au conflit armé communiste aux Philippines (National Task Force on Ending Local Communist Armed Conflict, NTF-ELCAC), qui dispose d’un budget de milliards de pesos, faisant de cette pratique de l’étiquette rouge la politique officielle de son gouvernement. Cette force est composée et a à sa tête d’anciens responsables de l’armée. Elle attribue des « étiquettes rouges » dans des posts sur les réseaux sociaux et dans des déclarations officielles.

Les organisations de la société civile ont appelé au retrait du financement de la force opérationnelle ou à son abolition. Les organisations nationales de défense des droits humains affirment que la tactique de la force opérationnelle consistant à attribuer des étiquettes rouges déclenche fréquemment des violences à l’encontre des personnes désignées. Karapatan, une organisation philippine de défense des droits humains dont les membres sont fréquemment placés sur liste rouge, affirme que des dizaines d’activistes ayant reçu cette étiquette rouge ont été tués ou arrêtés. Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a dénoncé ces meurtres.

Dans la vidéo de Human Rights Watch, Cristina Palabay, Secrétaire générale de Karapatan, décrit comment elle a été harcelée et menacée de viol et d’autres violences en conséquence de sa mise sur liste rouge. Mylene Cabalona, présidente du BPO Industry Employees’ Network, affirme que ses activités de plaidoyer en faveur des employés de centres d’appels lui ont valu des menaces sur les réseaux sociaux, y compris d’être accusée d’avoir des liens avec la rébellion communiste. Cong Corrales, rédacteur-en-chef du Mindanao Gold Star Daily, un journal du sud des Philippines, affirme que lui et sa famille ont été accusés d’être des sympathisants du parti communiste à cause de ses écrits.

« L’imposition d’étiquettes rouges est un élément clé de la campagne abusive du gouvernement philippin contre les activistes, les journalistes et les politiciens qui le critiquent », a affirmé Carlos Conde. « Les Nations Unies, l’Union européenne et les gouvernements pouvant avoir de l’influence ne devraient pas se contenter de dénoncer cette pratique meurtrière, mais devraient appeler publiquement le président Duterte à l’abandonner. »

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